Kristofer
Scott
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Libéria

Nous nous souvenons de Kristofer Scott

Kristofer Scott voit le jour le 6 août 1959 à Sanniquellie, dans le comté de Nimba, dans le nord-est du Libéria. Après sa scolarité à la St Mary's High School, à Sanniquellie, il étudie la géographie et la démographie à l’Université du Libéria, à Monrovia. En 1988, le journal The Standard l’engage comme graphiste et typographe. En décembre 1990, un ami lui fait savoir que le CICR recherche un cartographe. Scottie, comme le surnommaient ses proches, pose sa candidature. Il est rapidement embauché sur une base journalière au sein d’une équipe active sur le terrain dans le domaine de l’eau et de l’habitat. Dans un premier temps, sa tâche consistera à recenser les puits existants et à identifier les communautés où de nouveaux puits devront être construits en priorité. Au bout de six mois, la délégation du CICR à Monrovia lui propose un contrat à plein temps.

 

Dire que Scottie était polyvalent serait peu dire. Au cours de ses 20 ans de carrière au CICR, il endossera de nombreuses casquettes, travaillant tour à tour comme cartographe, assistant d’atelier, chauffeur, technicien de maintenance des groupes électrogènes, responsable des achats, agent d’accueil, chancelier, technicien informatique et enfin assistant informatique. Ses collègues le charriaient volontiers en lui disant qu’il avait la bougeotte, tout en admirant sa capacité de passer d’un job à l’autre avec la plus grande aisance. Mais Scottie n’était pas juste polyvalent. C’était une personne foncièrement bonne, loyale, généreuse et dotée d’un sens humain hors du commun. Père de sept enfants, il subvenait aussi en partie aux besoins d’autres membres de sa famille élargie à Monrovia, Maryland et Sanniquellie.

 

Un jour de mai 1996, tandis qu’il livre du matériel médical à des établissements de santé de la capitale Monrovia alors déchirée par des combats fratricides, Scottie est intercepté par les membres d’un groupe armé qui le prennent en otage. Il est finalement relâché, au terme d’intenses négociations. Face à la détérioration des conditions de sécurité, le CICR se voit toutefois contraint de restreindre ses activités et de rapatrier son personnel expatrié. Scottie travaille encore un temps comme chauffeur, mais lorsque le CICR décide de réduire encore davantage ses opérations, il se fait engager chez Médecins sans frontières comme chauffeur et assistant logisticien. Nous sommes en septembre 1998. Scottie ne travaille plus pour le CICR, mais il reste en contact étroit avec ses anciens collègues. Et dès que le CICR réembauche, en mai 2000, il réintègre les rangs de l’institution, qu’il ne quittera plus jusqu’à son décès. Dix ans durant, il occupera une multitude de postes, là où on avait le plus besoin de lui. Grâce à ses compétences de technicien informatique, Scottie supervisera par exemple l’installation du réseau de fibre optique de la délégation, avant de se voir confier la direction générale des services informatiques du CICR au Libéria. Ce qui l’amènera parfois également à offrir son soutien dans ce domaine à d’autres délégations de la région.

 

C’est le destin qui mettra brutalement un terme à la riche carrière de Scottie. Le 25 janvier 2011, en effet, il perd la vie dans un accident de la route alors qu’il se rend à la sous-délégation du CICR à Zwedru, dans le comté de Grand Gedeh, dans le sud-est du pays. Dans un hommage qu’ils lui adressent, ses collègues écriront : « La bonté et le naturel paisible de Scottie ont marqué tous ceux qui l’ont côtoyé au cours de son passage sur cette terre. La nature l’avait doté de grandes qualités dont il a toujours su user de manière avisée. Au cours de sa trop courte existence, il a sauvé, protégé et enrichi la vie d’innombrables personnes. Sans exception, nous avons tous été touchés à de nombreuses reprises par sa nature faite de gentillesse et d’humanité. »

Le CICR en
Libéria, 2011

En 2011, huit ans après la fin du conflit au Libéria, la pauvreté est toujours galopante, en dépit des efforts déployés par le gouvernement pour renforcer l’économie et les institutions du pays, reconstruire les infrastructures, rétablir les pouvoirs publics et favoriser la cohésion sociale. De nombreux Libériens peinent à accéder aux services publics de base, en particulier aux soins de santé. Le chômage atteint des sommets, notamment chez les jeunes, y compris les anciens combattants. Au cours des six premiers mois de l’année, des dizaines de milliers de réfugiés affluent vers l’est du Libéria, fuyant le conflit armé qui fait rage en Côte d’Ivoire voisine. Malgré la création de camps de réfugiés par les autorités libériennes et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, nombreux sont ceux qui préfèrent être hébergés par des familles d’accueil le long de la frontière. Dans ces régions reculées et pauvres, l’afflux de ces personnes met à rude épreuve les ressources déjà limitées des communautés locales, notamment en nourriture ainsi qu’en eau et assainissement.

 

Pour remédier à cette situation, le CICR, en étroite coopération avec la Croix-Rouge du Libéria, fournit des secours d’urgence et des vivres aux réfugiés et aux familles qui les accueillent. Il met en outre à leur disposition des services de rétablissement des liens familiaux et s’emploie à améliorer les infrastructures d’eau et d’assainissement existantes. Vers le milieu de l’année, alors que la situation se normalise peu à peu en Côte d’Ivoire, les réfugiés commencent à retourner chez eux, ce qui a pour effet d’alléger la pression sur les communautés locales. Tous ne le font pas, cependant. Certains, en particulier dans le comté de Grand Gedeh, hésitent en effet à rentrer en Côte d’Ivoire, de crainte de subir des discriminations ou encore redoutant que leurs biens et leurs moyens de subsistance n’aient été détruits. Le jour de la tragédie qui lui a coûté la vie, Scottie se rendait justement à Zwedru, dans le comté de Grand Gedeh.

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