Sheryl
Thayer
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Russie
I
- Apuleius

Nous nous souvenons de Sheryl Thayer

Sheryl Thayer naît le 6 décembre 1956 dans la ville de Gore, sur l’Île du Sud en Nouvelle-Zélande. Elle obtient son diplôme d’infirmière en soins généraux et obstétricaux en 1979 à Dunedin et commence à travailler à l’hôpital public de la ville. Plus tard cette même année, elle passe quatre mois dans la réserve aborigène de Palm Island, près de Townsville (Australie), où elle est la seule infirmière diplômée. En 1980, elle part pour Londres et est employée pendant trois ans par un cabinet de soins infirmiers. Elle retourne ensuite en Nouvelle-Zélande et trouve un poste d’infirmière à l’hôpital public de Wellington, où elle travaille dans le service des urgences de 1984 à 1988. Pendant cette période, elle obtient un diplôme de troisième cycle en soins d’urgence. Elle y ajoutera par la suite une formation spécialisée en gestion des catastrophes, qu’elle effectuera en Australie.

 

Sheryl est intelligente, dynamique, douée d’un réel esprit pratique et d’un grand sens de l’humour. Elle n’a jamais peur d’exprimer ses opinions, quel que soit le sujet. En même temps, elle a un côté réservé et sensible que connaissent bien les parents et amis avec lesquels elle a tissé des liens très profonds. Ces liens indéfectibles lui donnent la confiance et la liberté nécessaires pour s’engager sur la voie différente et éclectique qu’elle a choisi d’emprunter.

 

Détachée auprès du CICR par la Croix-Rouge néo-zélandaise, Sheryl entreprend sa première mission CICR en janvier 1989. Elle est affectée à l’hôpital chirurgical de Khao-I-Dang, proche de la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge. Elle y reste six mois, occupant successivement le poste d’infirmière en chirurgie et d’infirmière-cheffe. À son retour en Nouvelle-Zélande en juillet 1989, elle obtient un poste d’infirmière responsable à la clinique médico-chirurgicale Auckland Central Medical, après quoi elle travaille pendant trois mois comme infirmière de salle de réveil à l’hôpital public de Wellington.

 

En juin 1990, Sheryl est de nouveau détachée auprès du CICR et part pour Kaboul, en Afghanistan, où elle passe neuf mois en tant qu’infirmière dans un service de chirurgie. Elle retourne ensuite à Khao-I-Dang en août 1991 pour une mission CICR d’un an en tant qu’infirmière en chirurgie et infirmière-cheffe par intérim. En janvier 1993, elle commence un cours de troisième cycle en soins infirmiers de bloc opératoire tout en assumant un emploi d’infirmière à l’hôpital public de Wellington. Le CICR fait une nouvelle fois appel à elle en juillet 1994, et Sheryl travaille six mois en tant qu’infirmière en chirurgie à Jalalabad, en Afghanistan.

 

Au début du mois de décembre 1996, détachée cette fois encore par la Croix-Rouge néo-zélandaise, Sheryl commence une nouvelle mission CICR dans la république russe de Tchétchénie. Elle est basée dans le village de Novy Atagi, où le CICR a ouvert un hôpital de campagne à une vingtaine de kilomètres au sud de la capitale, Grozny. Elle arrive pleine d’enthousiasme et d’énergie, très motivée par son travail d’infirmière dans un service chirurgical.

 

Aux premières heures du 17 décembre 1996, six délégués, dont Sheryl qui a alors 40 ans, sont abattus dans leur sommeil par des hommes armés et masqués qui font irruption dans la résidence du CICR voisine de l’hôpital. Comme Sheryl, quatre des délégués assassinés avaient été détachés auprès du CICR par leur Société nationale de la Croix-Rouge : Ingebjørg Foss, 42 ans, et Gunnhild Myklebust, 50 ans, toutes deux infirmières de la Croix-Rouge de Norvège ; Hans Elkerbout, 47 ans, constructeur à la Croix-Rouge néerlandaise ; et Nancy Malloy, 51 ans, administratrice médicale de la Croix-Rouge canadienne. La sixième victime, l’infirmière-cheffe Fernanda Calado, 49 ans, de nationalité espagnole, travaillait pour le CICR depuis de nombreuses années. Un autre délégué, le Suisse Christophe Hensch, responsable du bureau du CICR à Novy Atagi, est blessé mais survit.

 

Jean de Courten, directeur des opérations du CICR, qualifie l’attaque d’« assassinat délibéré » et « lâche ». Après la tragédie, le CICR évacue ses 14 autres délégués de Novy Atagi à Naltchik, tandis que le personnel médical local continue à soigner les patients de l’hôpital. Dans l’hommage qu’il prononce pendant une cérémonie commémorative à la cathédrale Saint-Pierre de Genève quelques jours après l’attaque, le président du CICR, Cornelio Sommaruga, s’exprime en ces termes : « Ces six personnes étaient animées par un idéal de solidarité envers les victimes du conflit tchétchène. Elles remplissaient avec un enthousiasme exemplaire la mission originelle de la Croix-Rouge – secourir les blessés – et elles accomplissaient leur tâche dans le même esprit que les femmes de Solférino : “Tutti fratelli” [Nous sommes tous frères]. »

 

Sheryl était une infirmière extrêmement professionnelle et expérimentée, qui était animée par un sens aigu de la justice et un engagement sans faille envers les personnes dont elle s’occupait. Elle menait sa vie selon les normes exigeantes qu’elle s’était fixées et elle suivait son cœur, faisant toujours passer les autres en premier et donnant le meilleur d’elle-même. Pour elle, il aurait tout simplement été impensable de faire moins.

Le CICR en
Russie, 1996

Pour le CICR, comme pour d’autres organisations internationales humanitaires actives dans le Nord-Caucase, l’année 1996 est marquée par de nombreux problèmes de sécurité. Toutefois, rien ne laisse présager la tragédie qui va frapper l’institution : dans la nuit du 16 au 17 décembre, quatre mois après la conclusion d’un cessez-le-feu entre les Russes et les Tchétchènes, six délégués qui travaillent à l’hôpital de campagne de Novy Atagi, dont Sheryl, sont assassinés de sang-froid.

 

L’année a débuté par une reprise des combats en Tchétchénie entre les troupes fédérales russes et les séparatistes tchétchènes, obligeant les civils à fuir par vagues successives vers les républiques voisines. Ceux qui ne fuient pas se retrouvent bloqués chez eux pendant des semaines par des bombardements continus. En mai, sous les auspices de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), des représentants du gouvernement fédéral russe, du gouvernement tchétchène et des séparatistes se rencontrent à Moscou et signent un accord préliminaire de cessez-le-feu. La tension ne tarde toutefois pas à monter une fois de plus pour aboutir, en juillet, à une offensive de grande envergure des forces fédérales. Pendant trois semaines, les villages du sud de la Tchétchénie subissent de violentes attaques, tandis qu’à Grozny des cibles militaires et des structures civiles essuient des tirs presque incessants. Le 6 août, les forces séparatistes lancent une attaque contre Grozny et prennent le contrôle de la ville après deux semaines de combats acharnés. Les forces fédérales lancent un ultimatum annonçant leur intention de donner l’assaut à la capitale, à moins que les séparatistes ne se retirent. Environ 200 000 civils fuient la ville.

 

Le conflit a des effets catastrophiques sur les services publics dans de nombreuses localités, laissant la population pendant de longues périodes sans eau potable, ni électricité ni assainissement adéquat. Comme l’année précédente, les habitants de certains secteurs de Grozny dépendent entièrement du CICR pour leur approvisionnement en eau. Tous les hôpitaux de la ville ont été détruits ou gravement endommagés au cours des combats, d’où la décision du CICR d’ouvrir un hôpital de campagne à Novy Atagi.

 

En partie grâce aux efforts diplomatiques de la communauté internationale, les négociations reprennent et aboutissent à un cessez-le-feu conclu à Novy Atagi le 22 août. Le 31 août, les parties signent à Khassaviourt, au Daghestan, un accord prévoyant le retrait des troupes fédérales, le règlement de la question du statut de la république de Tchétchénie dans les cinq ans, et la création d’une commission conjointe de mise en application de l’accord. Si des divergences persistent, les combats, eux, cessent. En novembre, le président russe décrète le retrait de toutes les troupes fédérales, ouvrant ainsi la voie à la tenue d’élections en Tchétchénie au début de l’année suivante.

 

Tout au long de l’année, la sécurité reste une préoccupation majeure pour le CICR, que la dangerosité de la situation amène à réduire sa présence et à renforcer ses mesures de sécurité. En juillet, à la suite d’un énième incident, le délégué général, accompagné du chef de la délégation de Moscou et du chef de la mission du CICR dans le Nord-Caucase, a une entrevue avec le ministre russe de l’Intérieur à Moscou. L’objectif est d’obtenir son appui afin d’éviter de nouveaux incidents à l’avenir. En octobre, le délégué général nouvellement nommé rencontre le président de la république de Tchétchénie à Novy Atagi. Les problèmes de sécurité sont une fois de plus à l’ordre du jour de la réunion. De nouveaux incidents visant des employés du CICR et d’autres organisations se produisent en novembre, essentiellement des actes de banditisme. Des mesures de sécurité supplémentaires sont mises en place, mais en vain. Les assassinats du 17 décembre contraignent le CICR à suspendre tous les programmes nécessitant la présence de personnel international en Tchétchénie ; seules quelques activités se poursuivent, menées par les comités locaux de la Croix-Rouge et le ministère de la Santé.

 

1996 est une année particulièrement tragique pour le CICR. Quelques mois plus tôt, une attaque brutale à Mugina, au Burundi, avait déjà coûté la vie à trois délégués – Cédric Martin, Reto Neuenschwander et Juan Ruffino.

Souvenirs

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