Salahuddin Ramez voit le jour à Herat, dans l’ouest de l’Afghanistan, le 11 juillet 1952. Il fait ses écoles primaire et secondaire dans cette même ville, de 1958 à 1971. L’année suivante, il s’installe en Allemagne et, en 1974, entreprend des études de médecine à l’Université libre de Berlin. Son diplôme en poche, il travaille de 1981 à 1985 comme assistant et chirurgien interne à l’hôpital de district de Wittmund, sur la côte de la mer du Nord, où il se spécialise en chirurgie générale et en traumatologie.
Salah, comme ses proches l’appellent, retourne en Afghanistan en 1985 et devient chirurgien responsable de l’unité d’orthopédie et de traumatologie de l’hôpital Wazir Akbar Khan de Kaboul, un poste qu’il occupera jusqu’en 1993. Pendant toute cette période, il poursuit sa formation en chirurgie orthopédique en Allemagne. Il suit ainsi des cours à Darmstadt, Ulm et Bochum, élargissant notamment ses compétences dans le traitement des fractures. Dès 1988, parallèlement à ses activités à l’hôpital Wazir Akbar Khan, Salah commence à travailler comme médecin, conseiller chirurgical et consultant pour la délégation du CICR en Afghanistan. Et ce, principalement à l’hôpital chirurgical de Karte Seh soutenu par l’institution à Kaboul, où il officiera comme chirurgien-chef deux ans durant. Toujours sur la brèche, dynamique et positif, il finit par être très courtisé pour ses vastes compétences. De 1991 à 1995, en plus de ses diverses activités, il fonctionne comme conseiller pour le Croissant-Rouge afghan.
En 1995, Salah quitte l’Afghanistan et passe six mois à l’hôpital chirurgical du CICR à Quetta, au Pakistan, dans un premier en tant que chirurgien-chef, puis comme membre de l’équipe chirurgicale. Il s’y consacre entre autres à améliorer la qualité des services et à former des chirurgiens locaux, et donne aussi régulièrement des séminaires sur la chirurgie de guerre.
Après cette parenthèse au Pakistan, il revient dans sa ville natale d’Herat, avec la perspective d’ouvrir un petit hôpital qui prendrait gratuitement en charge les personnes nécessitant des soins de chirurgie reconstructive. Mais les autorités lui mettent des bâtons dans les roues et il doit renoncer à son projet. Il postule alors pour un poste à plein temps au CICR, qui l’engage immédiatement et l’envoie à Kibuye, au Rwanda, où il travaillera comme chirurgien de septembre 1998 à avril 1999. Son naturel positif a pour effet de stimuler l’équipe chirurgicale, qui a à gérer une lourde charge de travail. Dynamique mais posé, Salah s’impose comme un véritable mentor, partageant ses connaissances et ses compétences avec le reste de l’équipe et les employés locaux. C’est par ailleurs un excellent communicateur. « Il a appris le français et le kinyarwanda en aussi peu de temps qu’il aurait mis pour suturer une plaie », relèvera plus tard un de ses collègues.
Après le Rwanda, Salah part pour une nouvelle mission au Soudan. Il est affecté à l’hôpital universitaire de Djouba, où il travaillera de mai à décembre 1999. Ses collègues parlent de lui comme d’un excellent chirurgien, qui a en outre le don d’établir de bons rapports tant avec les patients qu’avec les collaborateurs de l’établissement. Suit une nouvelle affectation de quelques mois à l’hôpital général de Dili, au Timor-Leste. Il y est le plus souvent le seul chirurgien à des kilomètres à la ronde. Puis Salah repart pour l’Afrique, et c’est en Sierra Leone qu’il exercera cette fois, à l’hôpital de Kenama soutenu par le CICR. Mais, début juillet 2000, de passage aux Pays-Bas où il est venu retrouver sa femme et sa fille, il tombe soudainement malade. Emmené à l’hôpital, on lui diagnostique une fièvre hémorragique, la fièvre de Lassa, une maladie virale aiguë, endémique en Sierra Leone. Tous les efforts déployés pour le sauver restent vains et Salah décède à l’hôpital universitaire de Leyde le 25 juillet. Il avait 48 ans.
Sa vie durant, Salah a fait preuve d’un engagement professionnel sans faille, que ce soit en tant que médecin, chirurgien ou encore humanitaire. Jeune médecin, il a laissé derrière lui l’Europe pour retourner en Afghanistan, son pays alors déchiré par la guerre, où il savait qu’on avait cruellement besoin de ses compétences. Des compétences qu’il mettrait plus tard au service d’hommes, de femmes et d’enfants dans d’autres zones de conflit aux quatre coins du monde.