Diomède
Nzobambona
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Cameroon

Son engagement et son esprit humanitaire ont été une source d’inspiration pour toutes celles et ceux qui ont eu l’honneur de travailler à ses côtés. Il a marqué de son empreinte les nombreux projets qu’il a menés à bien, et grâce auxquels des milliers de familles, d’enfants, de prisonniers, de malades, de blessés et d’autres personnes vulnérables ont pu bénéficier de ce cadeau inestimable qu’est l’accès à une eau potable de qualité.

- Marco Albertini, Water and Habitat Unit, Geneva

Nous nous souvenons de Diomède Nzobambona

Diomède Nzobambona voit le jour le 1er janvier 1959 à Mugano, un village du centre du Burundi. Il y fait ses premières années de scolarité avant d’entamer des études secondaires au Collège Notre Dame, dans la ville voisine de Gitega. En 1976, il part étudier la géologie à la Faculté des hydrocarbures et de la chimie de l’Université de Boumerdès, en Algérie. En 1981, son diplôme d’ingénieur en poche, il retourne au Burundi et commence à travailler pour une compagnie minière allemande basée dans la capitale Bujumbura. En 1988, il est embauché comme conseiller en charge du logement rural et des routes au sein du Département du développement rural du gouvernement burundais. Il y travaille jusqu’en 1994, puis rejoint l’équipe de l’Agence de la coopération belge au Burundi où, cinq ans durant, il dirigera un projet de logements durables basé sur l’exploitation de matériaux de construction locaux. Il accède ensuite au poste de directeur technique de l’entreprise de construction Bataco, basée à Bujumbura.

 

En août 2003, Diomède est engagé comme ingénieur en eau et assainissement par la délégation du CICR à Bujumbura. Le pays est alors aux prises avec une guerre civile interminable, qui fera des centaines de milliers de victimes entre 1993 et 2005. Grâce à ses nombreuses compétences, il se voit confier l’un des premiers postes de responsable des systèmes d’information géographique au CICR. En 2006, toutefois, craignant les persécutions du parti au pouvoir, il fuit le Burundi pour chercher protection au Canada, où sa femme et leurs trois jeunes enfants le suivront quelque temps plus tard. Sur place, Diomède rejoint la Croix-Rouge canadienne, qui le détachera pour plusieurs missions auprès de CICR en tant qu’ingénieur en eau et assainissement. Entre mai 2007 et décembre 2012, il travaillera ainsi pour l’institution à Abéché, au Tchad, à Najaf, en Irak, à Man, en Côte d’Ivoire, ainsi qu’à Gao et Mopti, au Mali.

 

Partout où ses pas le mènent, Diomède laisse invariablement l’impression d’une personne chaleureuse, attentionnée et consciencieuse, se liant d’amitié avec tout le monde et devenant le mentor de beaucoup de ses collègues. Il a toujours plein d’anecdotes à raconter et de bons conseils à prodiguer, et se fait un plaisir de partager les vastes connaissances qu’il a acquises au cours de ses nombreuses années d’expérience. Diomède est aussi un féru de marche à pied : pendant son temps libre, avec sa longue foulée, il parcourt inlassablement des kilomètres et des kilomètres. Il faut dire qu’il en impose par son physique, lui qui, du haut de sa stature de géant, dépasse facilement d’une tête la plupart de ceux qui le côtoient. C’est aussi quelqu’un qui sait conserver son sang-froid en toute circonstance. Par exemple en 2012, lorsque la ville de Gao tombe aux mains de groupes armés et qu’une dizaine de collaborateurs du CICR s’y retrouvent pris au piège pendant 48 heures, avant d’être évacués vers le Niger. Diomède figure parmi eux. Toujours très calme et posé, il contribuera à négocier leur sortie du pays.

 

En avril 2013, Diomède est engagé directement par le CICR comme collaborateur expatrié. Avec ce nouveau statut, les années qui suivront, il sillonnera le monde et enchaînera une série de missions qui l’emmèneront de la Mauritanie au Cameroun, en passant par le Soudan du Sud, le Nigéria et le Yémen. À Nouakchott, où il passera plus de deux ans, il acquiert une compréhension approfondie du pays, des défis auxquels les gens sont confrontés et de la façon de faire avancer les choses. Car, faire bouger les choses est ce qui lui tient le plus à cœur, quelles que soient les circonstances. Déterminé, curieux et méticuleux, Diomède est toujours à l’affût d’innovations dans les méthodes de travail, ou encore de nouvelles formations. C’est ainsi que, parallèlement à ses activités professionnelles, il décroche, en 2015, une maîtrise en génie civil de l’Université de Loughborough, au Royaume-Uni.

 

Après la Mauritanie, Diomède est envoyé à Juba, au Soudan du Sud. Nous sommes en septembre 2015. Il y devient le premier délégué eau et habitat en zone urbaine du CICR. Il appréhende sa nouvelle fonction avec le même enthousiasme et le même engagement de toujours, et excelle rapidement dans ce nouveau poste de cadre. Il se montre à la fois exigeant en termes de qualité du travail et déterminé à construire une équipe soudée et à instaurer un partenariat efficace avec les services des eaux locaux.

 

Deux ans plus tard, Diomède part pour le Nigéria. Il est affecté dans un premier temps à Port Harcourt, où il dirige une équipe eau et assainissement qui travaille sur un projet communautaire dans un bidonville de cette cité industrielle. Une fois de plus, son expérience dans le domaine se révèle très précieuse. Comme le seront d’ailleurs les compétences en leadership dont il fera preuve lors de la mission exigeante qui lui sera confiée dans un deuxième temps à Maiduguri, dans le nord-est du pays.

 

Diomède fait ensuite un bref passage par Djibouti, d’où il dirige à distance les activités menées par l’équipe eau et assainissement à Sanaa, au Yémen, s’étant lui-même vu refuser un visa d’entrée dans le pays par les autorités yéménites. Début 2020, le CICR l’envoie au Cameroun pour s’occuper des activités eau et habitat dans deux sous-délégations qu’il vient d’ouvrir, à Bamenda, dans le nord-ouest du pays, et à Buea, dans le sud-ouest. Sa mission est de recruter des ingénieurs et des techniciens hydrauliciens locaux, de les former et de les encadrer dans leur travail. Mais sans surprise, fort de l’expérience et des connaissances qu’il a accumulées pendant deux décennies au service du CICR, Diomède relève le défi avec brio. Comme à l’accoutumée, il ne tarde pas à se faire apprécier de tous ses collègues, qui seront ravis lorsqu’il décidera de prolonger son séjour sur place d’un an.

 

Mais le dimanche 22 août, alors que, comme tous les week-ends, il fait ses kilomètres de marche hebdomadaires, il est violemment agressé par des hommes en armes, en plein après-midi, dans les rues de Bamenda. Transporté à l’hôpital, il succombe à ses blessures le jour suivant. Il avait 62 ans.

 

Par son sens profond de l’humanité et de l’amitié, Diomède a marqué durablement celles et ceux qui ont eu la chance de croiser sa route. Partout dans le monde, les collaborateurs du CICR continueront à bénéficier longtemps encore de sa sagesse et de sa riche expérience de vie. Membre actif de l’équipe à l’origine du projet « Boussole des valeurs », une consultation interne lancée par le CICR dans le but de définir un nouvel ensemble de valeurs devant présider à la destinée de l’institution, Diomède aura en effet indirectement contribué à perpétuer les idéaux qui étaient les siens.

Le CICR en
Cameroon, 2021

En 2021, lorsque Diomède arrive au Cameroun, des combats continuent d’opposer les forces gouvernementales à des factions du groupe armé autoproclamé État islamique en Afrique de l’Ouest, également connu sous le nom de Boko Haram, dans la région de l'Extrême-Nord du Cameroun, en particulier. Au même titre que le Tchad, le Niger et le Nigéria, le Cameroun fournit des troupes à la Force multinationale mixte mise en place pour lutter contre les insurgés de Boko Haram. Dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, des affrontements se produisent aussi régulièrement entre l’armée régulière et les forces d’opposition. Des milliers de personnes, contraintes de se déplacer du fait de la violence et de l’insécurité, peinent à subvenir à leurs besoins quotidiens. La pandémie de Covid-19 et les mesures instaurées par le gouvernement pour tenter d’enrayer sa propagation ne font qu’ajouter à leurs difficultés. Le système de santé du pays est au bord de l’effondrement, et des problèmes d’ordre sécuritaire, logistique et financier empêchent les organisations humanitaires d’atteindre certaines communautés vivant notamment dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, délimitées par le Nigéria et les rives du lac Tchad.

 

En 2021, conjointement avec la Croix-Rouge camerounaise, le CICR poursuit l’assistance qu’il fournit de longue date aux personnes touchées par les violences armées dont le pays est le théâtre. S’il intensifie ses distributions de vivres et renforce ses efforts visant à soutenir la production alimentaire, il doit par contre réduire ou suspendre plusieurs autres activités qu’il menait jusque-là au Cameroun, en raison de contraintes administratives ou de problèmes liés à la sécurité. Dans le domaine de l’eau et de l’assainissement, les équipes de l’institution, comme celles que dirige Diomède à Bamenda et Buea, restent, elles, très actives. Elles s’attachent à construire, remettre en état ou équiper des systèmes d’approvisionnement en eau, et à former des techniciens locaux à leur entretien, permettant ainsi aux communautés de bénéficier d’un meilleur accès à l’eau potable. Le CICR apporte aussi un soutien régulier à plusieurs centres de santé et à un hôpital, ainsi qu’une aide ponctuelle sous forme de matériel médical et de médicaments à des hôpitaux et des établissements de soins, en particulier lorsque des flambées de violence se produisent. Ses délégués mènent en outre des activités dans le domaine de la détention. Sur l’ensemble de l’année, ils visiteront quelque 9200 personnes dans une vingtaine de lieux de détention, conformément aux modalités habituelles de l’institution.

Souvenirs

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